Skip to main content

Le point sur la transparence des contrats

Il reste un peu plus de six mois avant que les pays mettant en œuvre l’ITIE soient tenus de publier les accords nouveaux ou modifiés afférents aux activités extractives. Dans la perspective de cette étape importante, nous faisons le point sur les progrès réalisés et les goulets d’étranglement rencontrés dans le domaine de la transparence des contrats à ce jour.

Les gouvernements et les entreprises qui publient les contrats conformément à la Norme ITIE offrent aux parties prenantes les informations nécessaires pour comprendre et vérifier le respect des modalités, des obligations et des paiements découlant de projets d’extraction dans leurs pays.

Les parties aux contrats d’extraction ont beaucoup à gagner et peu à perdre d’une telle divulgation. Lorsque les contrats sont divulgués publiquement, il devient plus facile de les comparer, de les examiner et de les appliquer. La transparence permet aux entreprises d’expliquer leur contribution à l’économie nationale et les conditions en vertu desquelles elles paient des redevances et des impôts. La divulgation des contrats contribue à promouvoir des règles du jeu équitables et incite les responsables à conclure des contrats qui reflètent l’intérêt supérieur des citoyens.

Des progrès certains

La divulgation des contrats progresse régulièrement dans les pays de l’ITIE. Bien que l’Exigence 2.4 de la Norme ITIE s’applique aux contrats qui seront exécutés après le 1er janvier 2021, plus d’une trentaine de pays mettant en œuvre l’ITIE divulguent d’ores déjà une partie ou la totalité de leurs contrats. Il reste encore à évaluer la complète transparence des contrats au niveau des pays, mais une enquête réalisée par le Natural Resource Governance Institute (NRGI) et l’ITIE montre que d’importants progrès sont en cours.

Source : Base de données Natural Resource Governance et secrétariats nationaux de l’ITIE

 

Source : Base de données Natural Resource Governance et secrétariats nationaux de l’ITIE

Les points de détail

Les contrats d’extraction sont souvent longs, complexes et difficiles à interpréter. Pour ces raisons, il est préférable que la divulgation des contrats se fasse de façon systématique, sur le portail de l’administration publique ou les plateformes d’entreprise. Ils peuvent y être régulièrement mis à jour pour rendre compte d’ajouts et de modifications périodiques, procurant ainsi un accès rapide à l’information d’une manière qu’une déclaration a posteriori ne permet pas de faire.

Les pays diffèrent dans leurs systèmes et leurs approches juridiques. Les registres de contrats nationaux tiennent compte des caractéristiques juridiques et réglementaires uniques de chaque pays. Ils devraient être accessibles dans la plus large mesure possible aux personnes directement touchées par les activités extractives.

Le réseau de la transparence des contrats de l’ITIE rassemble des exemples de bonnes pratiques suivies dans le monde entier et sert de forum pour y partager une expérience précieuse. À ce jour, ce réseau rassemble 21 pays qui prônent la divulgation des contrats, notamment à l’aide d’un large éventail d’expériences sur le plan national. Par exemple :

  • Le Mexique publie les contrats de pétrole et de gaz sur un portail des contrats hébergé par la Commission nationale des hydrocarbures (CNH). Cette plateforme explique les processus réglementaires adoptés pour la passation des marchés et permet aux utilisateurs de voir les modifications apportées aux contrats au fil du temps. Le Mexique divulgue également de manière systématique les processus d’octroi de licences. Il publie des informations sur la mise en œuvre des dispositions contractuelles, notamment les paiements versés à l’État et les données de production, ainsi que du contenu local.

  • Le Ghana publie une partie de ses plus gros contrats pétroliers et gaziers offshore sur son registre pétrolier, une plateforme accessible au public et facile d’utilisation. Ce registre fournit des renseignements contextuels et des synthèses utiles, tels que les conditions fiscales, la situation et la phase d’exploitation, les parties contractantes et des copies des permis connexes.

  • Il manque au Tchad les ressources nécessaires pour publier systématiquement les contrats et les licences en ligne, mais l’engagement du gouvernement en la matière ouvre la voie vers une transparence des contrats. Suite à un décret promulgué en novembre 2019, l’ITIE-Tchad a rassemblé les contrats existants sous un format de données ouvertes, disponibles désormais sur son site internet. Pour compléter ces divulgations, l’antenne publie les décrets d’approbation d’octroi de licences minières, y compris celles accordées à des fins d’exploration, d’activités minières artisanales et à petite échelle et d’activités de production à plus grande échelle.

Goulets d’étranglement et difficultés

Malgré les avantages potentiels de la divulgation des contrats, des difficultés demeurent. Elles portent principalement sur les contraintes de capacités, des préoccupations relatives aux dispositions de confidentialité, les expurgations (suppression de certaines clauses avant la publication) ou tout simplement le manque de volonté des pouvoirs publics ou des entreprises de donner la priorité à la transparence dans ce domaine. Les répercussions du Covid-19 sont susceptibles de présenter d’autres obstacles aux pays désireux de se plier à cette exigence.

Dans certains d’entre eux, les progrès vers une divulgation complète sont entravés par des éléments du cadre juridique et réglementaire. Ainsi, en Argentine et en Colombie, les organismes de réglementation et les entreprises ont choisi d’exclure les informations confidentielles des contrats publiés. Certaines stipulations contractuelles incluses dans les contrats d’hydrocarbures et d’exploitation minière sont réglementées au niveau provincial. Il n’existe donc pas d’approche uniforme à la transparence.

D’autres pays, dont la Côte d’Ivoire, Madagascar et le Myanmar relèvent l’existence de dispositions de confidentialité dans les modèles de contrats de partage de la production. Une autre difficulté, particulièrement pertinente en République démocratique du Congo, tient à la collecte d’informations de base sur le nombre de contrats en vigueur. Il manque encore à certains pays riches en ressources, dont le Nigeria et l’Indonésie, la mobilisation politique nécessaire pour obtenir la divulgation des contrats.

La voie vers 2021

Il conviendra d’agir sur plusieurs fronts pour traduire un soutien politique de haut niveau favorable à la transparence des contrats en leur divulgation systématique et complète. Des ressources devront être mobilisées pour aider les pays dépourvus des capacités gouvernementales nécessaires à développer une plateforme pour la divulgation des contrats. Il s’agira de trouver des moyens d’apaiser les inquiétudes relatives à la divulgation des contrats contenant des informations commercialement sensibles. Dans certains cas, des groupes multipartites devront adopter une approche proactive dans le dialogue avec les gouvernements pour faire en sorte que la divulgation des contrats soit inscrite au rang des priorités. Tous ces efforts seront particulièrement difficiles à déployer au cours du deuxième semestre de l’année, alors que de nombreux pays de l’ITIE lutteront pour atténuer les effets de la pandémie de Covid-19 et que d’autres s’attendent à les voir empirer.

S’il y a une leçon à retenir de la pandémie de Covid-19, c’est bien le caractère essentiel de la transparence pour assurer une gouvernance responsable. Dans le secteur des industries extractives, où les retombées de la volatilité des prix des matières premières risquent de freiner encore plus les investissements futurs, la divulgation des contrats peut s’avérer un outil précieux à la reconstruction d’un secteur plus ouvert et plus redevable. Dès lors qu’ils connaissent les conditions des contrats, les citoyens ont les moyens de comprendre la contribution financière vitale apportée par les ressources naturelles du pays pour atténuer les effets de l’actuelle crise sanitaire et de répondre aux priorités de développement de demain.