Skip to main content
Fallback image

Vision 20/20 sur la propriété des entreprises

Qui détient les entreprises extractives ? Au 1er janvier 2020, de nouvelles Exigences ITIE concernant la divulgation des propriétaires des entreprises extractives entreront en vigueur. À la veille de cette date charnière, nous faisons le point sur les progrès accomplis en matière de divulgation des bénéficiaires effectifs dans les pays mettant en œuvre l’ITIE.

La complexité des réseaux de propriété des entreprises est un aspect important du monde des affaires moderne. Ces chaînes de société imbriquées à la manière de poupées russes peuvent masquer l’identité des propriétaires réels, c’est-à-dire ceux qui contrôlent les entreprises et qui bénéficient en dernier ressort de leurs activités. Dans le secteur extractif en particulier, les flux de revenus illicites, le blanchiment d’argent et la fraude fiscale représentent une manne financière considérable. L’identification des bénéficiaires ultimes des revenus extractifs est donc un vrai sujet.

Afin de lutter contre l’anonymat, la Norme ITIE a été modifiée en 2016 pour ajouter de nouvelles dispositions sur la transparence des bénéficiaires effectifs. À compter de 2020, toutes les entreprises pétrolières, gazières et minières qui font une demande de licence ou de contrat de production ou d’exploration, ou qui y détiennent une participation directe, sont tenues de publier les noms de leurs propriétaires réels. Après l’entrée en vigueur de cette exigence au 1er janvier, les Validations de la mise en œuvre de l’ITIE ayant débuté après cette même date examineront les divulgations relatives aux bénéficiaires effectifs.

Notre bilan des progrès accomplis à ce jour en matière de divulgation des bénéficiaires effectifs porte sur trois grands volets de la transparence de la propriété effective : l’engagement politique, les réformes législatives et la divulgation des données relatives à la propriété. Publier des données sous un format utilisable par les parties prenantes est une étape essentielle pour instaurer une réelle responsabilité.

Engagement de l’État

Comme pour bien d’autres Exigences ITIE, la divulgation commence par un engagement de l’État en faveur de la transparence.

D’après notre bilan, 32 pays mettant en œuvre l’ITIE se sont engagés à faire la transparence sur les bénéficiaires effectifs. Bien qu’un tel niveau d’engagement politique soit encourageant, précisons toutefois que certaines de ces promesses ont été formulées par d’anciens gouvernements et que, dans au moins sept cas, le manque de volonté politique envers les objectifs de transparence sur la propriété a été jugé problématique.

Pour que de nouveaux progrès soient réalisés, il faudra sans doute démontrer la valeur de la transparence sur la propriété, ce qui nécessitera une participation active de la part des entités de l’État, des entreprises et de la société civile. Les prochaines Validations ITIE pourraient aussi favoriser la prise de mesures dans ce sens.

Le Secrétariat international collaborera avec les représentants des États, des entreprises et de la société civile pour les aider à expliquer pourquoi la transparence des bénéficiaires effectifs peut appuyer les réformes de lutte contre la corruption et faciliter la mobilisation de ressources nationales.

Réformes législatives

Sur les 51 pays de mise en œuvre de l’ITIE évalués dans une enquête récente, 21 avaient adopté des lois pour appuyer la divulgation des bénéficiaires effectifs et 17 prévoyaient de le faire. On distingue globalement deux catégories de lois. Certains pays comme l’Indonésie, le Kazakhstan et la République kirghize ont adopté des lois sectorielles. Dans d’autres comme l’Argentine, le Ghana, le Pérou, l’Ukraine et la Zambie, la divulgation des bénéficiaires effectifs relève du droit des entreprises et ne se limite pas au secteur extractif.  

Les lois adoptées par les pays mettant en œuvre l’ITIE leur donnent un vaste éventail de choix pour exécuter ou renforcer les mesures qui appuient la divulgation de la propriété effective. Plus tôt dans l’année, l’ITIE a examiné ces approches législatives et recensé huit aspects couverts par ces lois :

  • Identification de l’autorité compétente
  • Identification des entités déclarantes
  • Définition de la propriété effective
  • Détails sur l’identité des bénéficiaires effectifs
  • Vérification des données
  • Sanctions pour fausse déclaration ou non-divulgation
  • Exigences relatives à la mise à jour des informations
  • Règles d’accès à l’information

Bien que des progrès considérables aient été accomplis dans les pays de l’ITIE, il serait nécessaire de compléter les lois antérieures aux Exigences ITIE par des mesures plus ciblées afin de combler les lacunes et insuffisances potentielles dans les déclarations ITIE.

Divulgation de données

Bien que les divulgations ne soient pas encore exhaustives ni systématiques et continuent de figurer essentiellement dans les Rapports ITIE, 31 pays mettant en œuvre l’ITIE ont publié au moins certaines données sur les bénéficiaires effectifs des entreprises. Les divulgations paraissent surtout dans les Rapports ITIE. À ce jour, seuls deux pays mettant en œuvre l’ITIE, le Royaume-Uni et l’Ukraine, ont créé des registres publics. L’Ukraine a aussi établi un registre public des personnes politiquement exposées. Ces initiatives sont de bons exemples de mesures prises pour divulguer les données de façon systématique et sous un format accessible au plus grand nombre.

S’ajoutant à cette liste de précurseurs, le Nigéria a fait un premier pas important il y a quelques jours en créant une base de données publique des bénéficiaires effectifs de 56 entreprises du secteur des hydrocarbures, d’après des informations tirées des Rapports ITIE ainsi que de divers registres publics. Bien que ces informations ne soient pas encore complètes, le registre propose une fonction de recherche et facilitera les démarches engagées par la société civile et d’autres acteurs pour améliorer les données en vue de la prochaine Validation du Nigéria, qui aura lieu en janvier 2021.

2020 : la concrétisation

La divulgation des bénéficiaires effectifs reste une question complexe et difficile dont la réalisation doit s’accompagner de réformes législatives. Une fois les données publiées, l’objectif doit être d’améliorer leur qualité et d’examiner comment leur utilisation peut entraîner une amélioration de la responsabilité. Des outils tels que l’application Remtrack récemment lancée au Nigéria permettent de présenter les données sous un format accessible aux citoyens.

Les attentes envers les entreprises soutenant l’ITIE établissent que les entreprises doivent montrer l’exemple en soutenant les divulgations. Certaines entreprises telles que Rio Tinto, ont déjà entrepris de publier les données relatives à leur propriété. D’autres ont admis l’importance de ces informations, par exemple dans le cadre des contrôles préalables et pour comprendre les structures de propriété des prestataires de services et sous-traitants.

Alors que l’Exigence relative aux bénéficiaires effectifs va bientôt entrer en vigueur, les pays mettant en œuvre l’ITIE vont devoir redoubler d’efforts en matière de divulgation des bénéficiaires effectifs des entreprises extractives, afin de faire de leurs engagements des données utilisables et accessibles.

 

Ressources complémentaires :

 

Correction : L'article original comprenait un graphique qui indiquait faussement que 39 % des pays disposent de données sur la propriété effective dans des bureaux physiques, tandis que 2 % n'ont pas de données accessibles au public. Ces chiffres ont été inversés par erreur. Le graphique a depuis été mis à jour avec les informations correctes.